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Et si le management de projet pouvait s’inspirer du terrain de sport collectif pour gagner en efficacité ? À première vue, piloter une équipe projet et entraîner un groupe de joueurs peuvent sembler éloignés. Pourtant, les parallèles sont nombreux : recherche de performance, adaptation constante, coordination de profils variés et conduite vers un objectif commun.

En croisant les enseignements du rugby avec ceux de la gestion de projet, on découvre des leviers puissants pour motiver une équipe, faire vivre une stratégie, gérer les aléas ou transformer les échecs en rebonds. Entre leadership, pragmatisme et culture du collectif, certaines pratiques issues du sport offrent des pistes concrètes pour les chefs de projet en quête d’impact.


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S’inspirer du sport pour manager efficacement une équipe projet

Le parallèle naturel entre projet sportif et projet d’entreprise

Encadrer une équipe sur un terrain de sport ou piloter un projet en entreprise repose sur des fondations similaires : un objectif défini, un cadre temporel, des ressources limitées et un besoin constant de coordination. Dans les deux cas, il s’agit de mobiliser un collectif autour d’une ambition, en tenant compte des forces et des contraintes du moment.

Dans les clubs amateurs ou semi-professionnels, comme dans beaucoup de projets d’entreprise, le management est souvent non hiérarchique. Il faut composer avec des profils différents, souvent bénévoles ou partiellement impliqués, et obtenir leur engagement sans autorité directe. Cette réalité impose un style de management fondé sur l’influence, la clarté des objectifs et la création d’un cadre motivant.

« Dans un club, il faut manager des bénévoles. Dans un projet, ce sont souvent des contributeurs sans lien hiérarchique direct. La posture est la même : il faut embarquer. »

Le rôle du coach sportif et du chef de projet : même combat ?

Le coach sportif, comme le chef de projet, endosse un rôle transversal : il n’est pas toujours décisionnaire, mais il est responsable de la dynamique d’équipe et des résultats. Il doit fédérer, ajuster en cours de route, faire progresser chacun tout en gardant le cap collectif.

Le parallèle va plus loin encore lorsqu’on observe la diversité des « projets » à gérer dans un club sportif : activités sportives, finances, communication, partenariats, événements… Une organisation en portefeuille de projets se dessine, à l’image de ce qu’on retrouve dans de nombreuses entreprises.

Des principes de stratégie applicables du terrain à l’entreprise

L’exécution de la stratégie : présence terrain et leadership actif

Dans le sport comme dans l’entreprise, une stratégie n’a de valeur que si elle est traduite en actions concrètes. Et cela suppose que ceux qui la définissent restent connectés au terrain. Un entraîneur ne conçoit pas un plan de jeu pour ensuite disparaître : il est présent aux entraînements, ajuste en fonction des retours, motive ses joueurs et accompagne chaque étape.

Ce principe s’applique directement au pilotage de projets. Trop souvent, les dirigeants conçoivent une feuille de route sans accompagner son exécution. Cela crée une fracture entre la vision stratégique et la réalité opérationnelle. Or, un chef de projet ou un sponsor impliqué, visible, à l’écoute, renforce la cohérence et l’engagement des équipes.

« Un entraîneur, il ne reste pas chez lui le jour du match.
Dans l’entreprise, on oublie parfois ce lien entre ceux qui décident et ceux qui exécutent. »

Objectifs clairs et jalons intermédiaires : aligner les équipes sur une ambition

Les clubs sportifs travaillent avec des objectifs clairs : se maintenir, monter en division, atteindre les phases finales… Mais ces objectifs sont toujours déclinés en jalons intermédiaires – matchs aller, retours, tournois préparatoires – qui permettent de maintenir une dynamique et de mesurer les progrès.

En gestion de projet, cette approche reste parfois négligée. Pourtant, découper l’objectif global en étapes visibles, concrètes, mesurables est essentiel pour mobiliser les équipes, ajuster en cours de route et célébrer les réussites partielles. Cela s’inscrit pleinement dans les bonnes pratiques de gestion du portefeuille de projets, où chaque initiative s’articule avec une vision d’ensemble.

Une gestion d’équipe centrée sur la coopération et la motivation

Management non hiérarchique et gestion transversale

Dans le sport amateur comme dans de nombreux projets, le management repose rarement sur un lien hiérarchique direct. Il s’agit plutôt de faire adhérer, d’embarquer, de donner du sens. L’autorité ne vient pas d’un titre, mais de la capacité à créer un cadre de confiance et d’action partagée.

Le chef de projet, comme l’entraîneur, doit composer avec des profils variés, aux engagements fluctuants. Il doit apprendre à influencer, convaincre, prioriser sans imposer. C’est cette posture qui permet à une équipe de rester mobilisée même dans l’incertitude.

« Le chef de projet, il a besoin de tout le monde,
même de ceux qui ne sont pas les plus moteurs.
Il faut trouver le moyen d’embarquer tout le monde. »

Serge Amon

S’appuyer sur les leaders naturels pour porter le projet

Les entraîneurs s’appuient sur les “leaders du vestiaire” : des joueurs influents, moteurs, capables de relayer les messages au sein du groupe. En gestion de projet, cette logique est tout aussi pertinente. Il s’agit d’identifier, au-delà des organigrammes, les personnes-clés capables d’incarner le changement, de motiver les autres et de faire circuler les informations.

Ces leaders informels deviennent des relais essentiels, notamment dans les projets de transformation. Ils jouent un rôle actif dans la conduite du changement, au même titre que les sponsors ou les pilotes de chantier.

Pour approfondir : Mobiliser les parties prenantes dans un projet

L’importance des émotions dans la mobilisation collective

Le sport sait jouer sur les émotions : fierté collective, désir de se dépasser, sentiment d’appartenance. En entreprise, ces leviers sont souvent mis de côté, au profit de logiques rationnelles et de reporting. Pourtant, le sens, l’émotion, la reconnaissance sont des moteurs puissants.

Travailler sur les émotions, sans tomber dans le pathos, permet de créer une dynamique plus authentique, plus humaine. Cela passe par des moments partagés, de la reconnaissance, ou simplement l’attention portée à ce que vivent les membres de l’équipe.

« Le coach sportif travaille sur l’émotion.
En entreprise, c’est encore trop tabou.
Mais ça reste un levier fort pour engager. »

Serge Amon

L’art de composer avec les ressources disponibles

Adapter sa stratégie au contexte et aux aléas

Le sport amateur apprend une leçon essentielle : faire avec ce qu’on a. Pas de recrutement XXL, pas toujours les profils idéaux… mais une obligation d’agir avec pragmatisme, en s’adaptant au terrain, à l’adversaire, à la météo, aux blessures. Ce sens de l’ajustement permanent est une compétence-clé pour tout chef de projet.

Les projets ne se déroulent jamais exactement comme prévu. Délais, budgets, ressources : tout peut évoluer. Développer une culture d’adaptation, de réactivité et de recul est un facteur de réussite à long terme. Cela suppose un état d’esprit flexible, mais aussi une préparation structurée : scénarios alternatifs, priorisation des actions, et capacité à changer rapidement de cap si nécessaire.

« Tout ne se passera pas comme prévu.
Ce n’est pas être défaitiste de le dire, c’est juste être prêt. »

Serge Amon

Cultiver l’intelligence situationnelle et la résilience

Au rugby, les joueurs sont nombreux sur le terrain, les rôles sont variés et les configurations changent en permanence. Ce qui fait la différence, c’est la capacité à lire la situation, à s’adapter en temps réel et à prendre des décisions efficaces dans l’incertitude.

Cette “intelligence situationnelle” est tout aussi utile en projet. Elle repose sur l’expérience, la diversité des cas rencontrés, la capacité à se projeter dans différents scénarios. C’est un socle de ce que le PMBOK appelle aujourd’hui la résilience : anticiper les imprévus, réagir sans paniquer, et rebondir après un échec.

Pour approfondir : Gérer les imprévus et développer la résilience projet

Valoriser l’échec pour progresser

Valoriser, assumer, relativiser : une méthode inspirée du rugby

Dans le sport, l’échec est une composante naturelle du parcours. Il n’y a qu’un seul vainqueur, et chaque défaite est l’occasion d’un apprentissage. Cette approche constructive peut transformer la manière dont on vit les difficultés en gestion de projet.

Serge AMON évoque une méthode issue du rugby professionnel, appliquée par l’entraîneur Christophe URIOS : valoriser – assumer – relativiser.

  • Valoriser : reconnaître les efforts fournis, saluer les contributions de chacun, même si le résultat n’est pas là.
  • Assumer : accepter sa part de responsabilité en tant que chef de projet ou sponsor, sans tout rejeter sur l’extérieur.
  • Relativiser : remettre l’échec dans un cadre plus large. Un projet qui s’arrête n’est pas une catastrophe s’il permet de réallouer les ressources intelligemment.

Ce triptyque offre une manière saine et motivante de vivre les revers. Il permet aussi de préserver la dynamique d’équipe dans la durée.

« Une défaite, ce n’est pas la fin.
C’est un apprentissage. »

Serge Amon

Accepter l’arrêt d’un projet comme levier d’apprentissage

Clôturer un projet prématurément peut être vécu comme un échec. Pourtant, dans une logique de portefeuille de projets, cela peut être une décision stratégique cohérente. Encore faut-il savoir l’assumer, l’expliquer, et en tirer des enseignements utiles.

Ce travail de capitalisation passe par une revue de fin de projet honnête et constructive, qui identifie les succès, les axes d’amélioration et les signaux faibles. C’est aussi un moment important pour renforcer la culture du feedback et développer une vision à long terme plus mature.

Apports concrets et limites du modèle sportif

Ce que le sport peut véritablement apporter à la gestion de projet

S’inspirer du sport, ce n’est pas adopter une posture théorique : c’est aller chercher des pratiques concrètes et transposables. Parmi les apports les plus marquants :

  • La culture de l’objectif clair, partagé et incarné collectivement ;
  • L’importance du collectif et de la coopération transversale ;
  • La gestion du rythme, à travers les jalons, les cycles, les pics de performance ;
  • La capacité à rebondir après un revers, avec un état d’esprit résilient.

Le sport enseigne aussi la valeur de l’entraînement : en projet, cela se traduit par la formation continue, la répétition des bonnes pratiques, et l’ancrage de routines utiles.

Ces leviers sont autant de pistes d’action pour les chefs de projet souhaitant renforcer leur leadership et leur capacité à engager les équipes.

« Un projet, c’est un terrain d’expérimentation.
Comme en sport, on teste, on ajuste, on progresse. »

Les limites d’un parallèle : inspiration oui, transposition directe non

Pour autant, transposer les méthodes sportives dans l’entreprise n’est pas toujours évident. Plusieurs limites doivent être gardées en tête :

  • L’émotion est moins présente dans l’univers professionnel, souvent perçu comme plus rationnel ;
  • Le cadre hiérarchique en entreprise peut limiter l’approche transversale chère au sport ;
  • Le temps long des transformations culturelles ne s’accorde pas toujours avec les envies de résultats rapides inspirés du sport de haut niveau.

En résumé, l’inspiration sportive peut être un formidable levier pour stimuler une équipe projet, à condition de l’adapter au contexte réel. Il ne s’agit pas de copier, mais d’expérimenter.

Trois conseils pratiques à retenir

Pratiquer pour mieux comprendre

Le premier conseil peut sembler surprenant, mais il est profondément révélateur : pratiquer soi-même une activité sportive. Non seulement cela développe l’endurance et la discipline, mais cela permet aussi de ressentir de l’intérieur ce qu’est l’engagement collectif, la progression par l’effort et la gestion de la pression. Une manière directe de se reconnecter à l’expérience terrain.

« Mens sana in corpore sano.
Un chef de projet en forme, c’est un chef de projet plus lucide et plus efficace. »

S’entraîner en continu… comme les sportifs

Le parallèle est évident : un sportif ne progresse que par l’entraînement, la répétition, l’analyse de ses erreurs. Il en va de même pour le chef de projet. Se former régulièrement, revoir ses pratiques, tester de nouvelles méthodes : autant de leviers pour maintenir son niveau de jeu dans un environnement complexe.

C’est dans cette logique que s’inscrit la culture de l’amélioration continue : prendre le temps de débriefer, capitaliser, se perfectionner.

À découvrir : Nos formations pour progresser en gestion de projet

S’appuyer sur des relais pour démultiplier son action

Un chef de projet ne peut pas tout faire seul. Identifier des relais internes, des personnes moteurs qui partagent l’ambition du projet, permet de créer une dynamique plus robuste. Ces alliés facilitent la circulation des messages, détectent les signaux faibles, mobilisent leurs pairs. Ils deviennent des “leaders du vestiaire” version entreprise.

C’est aussi une stratégie efficace dans la conduite du changement, où l’implication des parties prenantes est décisive.

Conclusion

Le sport collectif, et le rugby en particulier, offre une grille de lecture inspirante pour repenser le management de projet. En s’appuyant sur l’intelligence du collectif, la clarté des objectifs, la résilience face aux aléas et la force du leadership partagé, les chefs de projet peuvent enrichir leurs pratiques et gagner en impact.

Cette approche ne remplace pas les méthodes traditionnelles : elle les complète. Elle permet de replacer l’humain, l’émotion et l’adaptation au cœur des dynamiques projet. Comme sur un terrain de sport, chaque projet devient alors une aventure collective où l’on apprend, on s’ajuste… et parfois, on gagne ensemble.

FAQ : sport et management de projet

Quelles compétences sportives sont utiles en gestion de projet ?

Leadership, adaptabilité, gestion du collectif et résilience sont des compétences sportives transférables dans le management de projet.

Pourquoi s’inspirer du sport pour manager une équipe projet ?

Le sport offre des modèles d’organisation, de motivation et de prise de décision dans l’action, utiles pour fédérer une équipe projet.

Peut-on transposer les méthodes du coaching sportif en entreprise ?

Certaines pratiques, comme l’appui sur les leaders informels ou la fixation de jalons clairs, sont parfaitement adaptables au contexte projet.


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