Réaliser un planning projet est un exercice délicat, surtout lorsqu’il inclut des marges. Ces marges, bien que cruciales pour anticiper les imprévus, sont souvent mal perçues par les commanditaires. Ces derniers peuvent considérer qu’elles représentent une sécurité excessive ou une perte de temps, préférant un planning plus optimisé. Pourtant, les marges sont indispensables pour assurer la réussite du projet.
Alors, comment faire accepter un planning réaliste avec des marges sans compromettre la confiance des commanditaires ?
Voyons ensemble des méthodes efficaces pour justifier et défendre votre planification tout en obtenant l’adhésion de vos supérieurs.
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Écoutez l’épisode de Focus Projet dédié à ce sujet.
Pourquoi les marges sont-elles essentielles dans un planning ?
En gestion de projet, il est rare qu’un projet se déroule sans obstacles.
Les marges dans un planning ne sont pas une preuve de laxisme ou un moyen de se protéger inutilement. Elles sont un outil indispensable pour s’assurer que le projet puisse avancer dans des conditions réelles.
Vous en doutez ?
Deux exemples :
Organiser six ateliers d’une demi-journée avec des managers très occupés peut théoriquement se faire en trois jours, mais dans la pratique, cela prendra souvent deux à trois semaines en raison des contraintes de disponibilité de chacun.
Pour des travaux extérieurs, si l’on prévoit qu’il pleut un jour sur trois, et qu’il est impossible de travailler dans ce cas, il est évident qu’une marge est nécessaire pour compenser ces conditions météorologiques.
Un planning trop optimisé repose sur un alignement parfait de tous les éléments, ce qui est très rarement le cas. Prendre des marges raisonnables permet d’anticiper les problèmes, de minimiser les retards et d’éviter des ajustements en catastrophe. C’est en somme un moyen de refléter fidèlement la réalité du terrain.
Anticipez les objections des commanditaires
Lorsque vous présentez un planning incluant des marges, il est probable que vos commanditaires remettent en question leur nécessité. Pour éviter ces objections, il est crucial de bien préparer votre argumentation.
Les commanditaires peuvent penser que vous exagérez les délais pour vous protéger ou pour vous donner plus de flexibilité. Ils chercheront alors à réduire, voire supprimer les marges. Expliquez-leur que si le planning est trop optimisé, les risques de dépassement augmentent, ce qui entraîne des retards imprévus et potentiellement des coûts supplémentaires.
Insistez sur le fait qu’un planning incluant des marges ne vise pas à diminuer la productivité, mais à garantir que le projet soit réalisable dans des conditions normales. Un planning trop serré peut sembler attrayant à court terme, mais il expose le projet à des retards plus importants en cas d’imprévu. Un planning avec des marges est plus réaliste et offre plus de sécurité, réduisant ainsi les risques.
Comment justifier et présenter vos marges efficacement
Faire accepter un planning avec des marges demande une justification solide et une présentation claire. Ce n’est pas seulement une question de convaincre, mais aussi de montrer que ces marges sont indispensables pour la viabilité du projet.
Voici quelques conseils pour vous aider dans cette tâche :
Justifiez les durées et les marges de votre planning de manière factuelle
La justification du planning est cruciale. Sans arguments concrets, les commanditaires risquent de percevoir ces marges comme superflues. Il est donc important de baser votre justification sur des faits et des analyses rigoureuses.
Justifiez les durées de manière factuelle
Appuyez-vous sur des statistiques ou des informations concrètes pour expliquer pourquoi vos marges sont nécessaires.
Par exemple, pour les travaux en extérieur, si l’analyse météo indique qu’il pleut en moyenne un jour sur trois, c’est un argument tangible pour expliquer que vous avez rallongé la durée d’un tiers. Vous avez juste pris en compte les jours de pluie probables.
Ce type de données rend la marge beaucoup plus compréhensible et difficile à contester, car elle repose sur des faits indiscutables. Cela montre que vous n’avez pas « sorti du chapeau » vos durées et les marges.
Liez les marges aux risques identifiés pour le projet :
L’analyse des risques est l’un des outils les plus puissants pour justifier vos marges. Une analyse de risques bien structurée permet d’identifier les menaces potentielles au respect des délais, telles que les dépendances entre tâches, les délais des fournisseurs ou encore les contraintes techniques.
Relier directement les marges à ces risques montre que vous n’inventez pas des délais supplémentaires, mais que vous anticipez des problèmes probables.
Par exemple, si votre analyse montre que les fournisseurs ont régulièrement des délais de livraison allongés, une marge intégrée pour ces retards devient justifiable et compréhensible. Cela montre également que vous avez une approche proactive de la gestion des imprévus.
En résumé, chaque marge doit être justifiée non pas de manière vague, mais avec des données spécifiques et des risques bien identifiés. Cela démontre que vos estimations sont rigoureuses et réfléchies.
Proposer des alternatives pour accélérer le planning
Même si vous justifiez parfaitement vos marges, certains commanditaires pourraient chercher à les réduire. Plutôt que de vous battre directement sur ce terrain, proposez des alternatives pour montrer que vous êtes flexible et à l’écoute, mais que ces alternatives ont un coût.
Accélération avec compensation :
Si les commanditaires insistent pour raccourcir le planning, proposez des solutions qui permettront d’accélérer certaines phases du projet. D’une manière ou d’une autre, ces solutions nécessiteront des contreparties. Cela peut être des ressources supplémentaires, un impact financier plus important, une implication du sponsor plus important…
Par exemple, pour des travaux en extérieur sensibles à la météo, vous pourriez proposer de mettre en place des structures temporaires pour protéger le chantier de la pluie, ce qui permettrait de respecter le calendrier même en cas d’intempéries. Cela entraînerait toutefois un surcoût.
Pour notre autre exemple concernant les ateliers, vous pouvez demander à la direction de passer la consigne aux différents participants de prioriser ces ateliers sur leurs autres activités. De cette manière, vous ne serez pas contraint par les différents agendas et pourrez enchainer les ateliers.
Ce type d’alternative montre que vous êtes prêt à accélérer le projet, mais que vous connaissez les impacts que vont avoir ces stratégies d’accélérations.
Utiliser l’indice de confiance pour renforcer votre argumentation
L’utilisation d’un indice de confiance associé à votre planning est une technique particulièrement utile pour rendre les marges plus acceptables aux yeux des commanditaires. Elle permet de quantifier le niveau de risque associé à votre planning.
L’idée est d’indiquer, « je pense qu’il y a X% de chance que l’on tienne ce planning par rapport aux différents risques qui pèsent sur le projet ». Cela permet de préciser de quelle manière le risque est couvert et pris en compte dans le planning.
Proposer plusieurs versions du planning avec différents niveaux de confiance :
Une façon efficace de justifier vos marges est de présenter plusieurs scénarios de planning, chacun avec un niveau de confiance différent.
Par exemple, un planning très optimisé, avec peu ou pas de marge. Il pourrait avoir un indice de confiance de 10 %, signifiant qu’il y a 90 % de chance de dépasser les délais prévus.
En revanche, un planning avec des marges raisonnables, conçu pour être réaliste face aux risques identifiés, pourrait avoir un indice de confiance de 70 %.
Cette approche permet de visualiser concrètement l’impact des risques et des marges associées sur le respect des délais. Cela peut en plus permettre aux commanditaires à choisir un planning de base en connaissance de cause.
Fixer à l’avance l’indice de confiance du planning
Une bonne pratique peut être de fixer à l’avance l’indice de confiance du planning. De cette manière, vous connaissez l’étendue de la couverture des risques qui est souhaité dans le planning. Cela peut être défini au niveau de l’entreprise pour l’ensemble des projets, ou plus spécifiquement pour un projet en particulier.
En engageant la discussion sur ce sujet, vous connaissez le niveau de risques sur le planning que vos supérieurs sont prêts à tolérer. Vous pouvez ajuster vos marges en conséquence.
Cependant, vous devez être clair sur le fait qu’un planning optimisé augmente le risque de retard et pourrait entraîner des surcoûts à long terme.
Faire preuve de transparence ou masquer les marges ?
Dans certains cas, vous pouvez être tenté de cacher vos marges pour éviter un débat avec vos commanditaires. Cependant, cette approche peut avoir des conséquences négatives.
De mon point de vue, il est préférable d’afficher vos marges et de les justifier de manière transparente. Cela vous permet de discuter ouvertement des risques et d’obtenir l’adhésion des commanditaires. Vous démontrez la connaissance de votre projet, et pouvez proposer des solutions pour accélérer si cela est nécessaire. La transparence facilite la communication et permet de mieux gérer les attentes.
Après malheureusement, il existe encore des environnements ou cela ne sers pas compris et accepté.
Si vous êtes dans cette situation, plaquez-les !
Conclusion
Faire accepter un planning avec des marges peut sembler difficile, mais c’est une étape essentielle pour garantir la viabilité d’un projet. En justifiant vos marges avec des données concrètes, en associant les risques aux solutions possibles, et en restant transparent, vous augmenterez vos chances de convaincre vos commanditaires. Si une optimisation est possible, elle doit être soigneusement équilibrée par une évaluation réaliste des risques et des aléas. La clé est de préparer une argumentation claire, fondée sur des faits, tout en proposant des options pour accélérer le projet si nécessaire.
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